La loi Veil
- Bonnin Jeanne
- 1 mars 2016
- 3 min de lecture
Video du discours d'ouverture de Simone VEIL, ministre de la santé, à l'assemblée nationale le mardi 26 novembre 1974.
Le 13 décembre 1973 un projet de loi sur l'autorisation à l'avortement avait déjà été étudié. Porté par Michel Poniatowski, ministre de la santé du gouvernement Messmer, le texte avait été rejeté par 225 voix contre 212.
Le 26 novembre 1974 débute un combat sans merci entre Simone Veil, ministre de la santé de l’époque, et les opposants à l’IVG. Le nouveau président Valéry Giscard d’Estaing lui confie la lourde tâche de défendre un projet de loi historique : la légalisation de l’interruption volontaire de grossesse.
Pendant trois jours, les députés de l’Assemblée Nationale vont débattre de cette loi. Simone Veil affrontera l’hostilité, voire l’agressivité de certains d’entre eux. L’Assemblée Nationale était à l’époque composée de seulement 9 femmes sur 478 députés. Durant ces 3 jours, 64 députés vont monter à la tribune, qu’ils soient partisans ou adversaires de la libération des femmes et du droit à l’avortement, ils défendront leurs idées.
Mardi 26 novembre 1974, les débats à l’Assemblée Nationale sont ouverts, Simone Veil prononce son discours dans un climat tendu et hostile. Plus de 25 heures de débats s'en suivront.
Hélène Missoffe, du parti de droite RPR (Rassemblement Pour la République) est la première à prendre la parole après la ministre Simone Veil. Partisante de cette loi pour la législation de l'IVG, elle s'exprime: "Se fermer les yeux, faire comme si le problème n'existait pas, est à la fois lâche, bête et stupide".
Les orateurs suivants seront des hommes de gauche, Jacques-Antoine Gau (Parti Socialiste) et Jacques Chambaz (Parti Communiste) sont favorables à l'IVG mais avec certaines nuances. Vient ensuite Jean Foyer, député de la majorité de droite. Fervant opposant à la loi, il dira à la tribune: "le temps n'est pas loin où nous connaitrons en France ces "avortoirs", ces abatoirs où s'entassent des cadavres de petits hommes et que certains de mes collègues ont eu l'occasion de visiter à l'étranger."La gauche proteste contre ces paroles tandis que la droite et le centre applaudissent le député.
Les propos avancés à la deuxième séance seront encore plus odieux.
Alexandre Bolo, député de droite comparera même ce nouveau droit à de "l'euthanasie légale". L'atmosphère est très tendue, Pierre Bourson tente de défendre Simone Veil. Gisèle Moraux, député communiste, sans cesse coupée par des sexistes se défend comme elle peut.
S'en suivent des députés plus partagés comme Albin Chalandon ou encore Hector Rolland qui sont dans l'hésitation, le doute. Ce débat entraine pour une majorité des députés présents dans l'hémicycle un profond malaise dans cette prise de décision difficile.
Plus tard dans le débat, des députés comme Jacques Médecin ou René Feit auront eux des propos très violents voire choquants, en comparant la loi Veil à de la barbarerie nazie et à un arrêt de mort. Ces propos cloturent la première journée de débats déjà difficile.
Cette deuxième journée de débat ressemblera fortement à la première. Les propos virulents et odieux envers Simone Veil et la loi qu'elle tente de défendre continuent à pleuvoir dans l'hémicycle. Les propos les plus choquants pour Mme Veil seront prononcés par Jean Marie Daillet qui dira " On est allé quelle audace incroyable ! jusqu'à déclarer tout bonnement qu'un embryon était un agresseur. Eh bien ! Ces agresseurs, vous accepterez, madame, de les voir, comme cela se passe ailleurs, jetés au four crématoire ou remplir des poubelles."
Cependant, face à cette adversité, quelques députés la soutiennent comme Jean Pierre Cot "Madame le ministre, votre courage et votre détermination font l'admiration de vos amis comme de vos adversaires [...] tenez bon".
Nous sommes au troisième jour des débats et la fatigue se fait ressentir. Les opposants à la loi ne savent plus comment argumenter leurs idées; ils deviennent de plus en plus violents verbalement. Emmanuel Hamel ira jusqu'à faire écouter dans l'hémicycle les palpitations du coeur d'un embryon de 49 jours.
Pendant trois jour, le débat est interminable, mais finalement, le 29 novembre 1974 le projet de loi est adopté en première lecture avec 284 voix contre 189.
Le projet de loi arrive ensuite au Sénat le 13 décembre 1974. Simone Veil défend à nouveau la loi sur l'IVG qu'elle juge nécésaire contre l'inégalité sociale des femmes devant une grossesse non désirée. Durant les débats, plusieurs personnes fermement opposés à la loi font entendre leur voix comme Jacques Henriet. Il dira : "La femme est libre de disposer de son corps mais pas de l’embryon qu’elle porte, maillon de la grande chaîne de l’évolution". Cependant, ils n'empecheront pas la loi d'être adoptée et promulgée le 17 janvier 1975. Au départ provisoire pour cinq ans elle sera ensuite adopté définitivement en 1979.
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